vulnérabilité

La beauté des paradoxes

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Est-ce que cela t’arrive aussi de penser une chose, et de simultanément accepter également son contraire ? Exemple concret : je suis adepte des repas vite préparés afin de gagner du temps pour ce qui m’importe encore plus (voir mon dernier post). Et, en même temps, je suis complètement fan des repas mijotés avec amour pendant des heures, et lorsque j’arrive à le faire, je me sens super bien avec moi-même.

J’ai longtemps considéré que ce genre de contradictions en moi étaient signe de faiblesse, un manque de confiance en moi, car je ne sais pas prendre parti pour l’une ou pour l’autre chose définitivement. Jusqu’au jour où j’ai entendu parler de « either / or thinking », versus « AND thinking ». En français : « la pensée en « Soit ceci, Soit cela », versus « la pensée en « Et ». (ça fait beaucoup de guillemets, tout ça !)

En très bref, j’ai appris il y a quelques années que le premier de ces schémas de pensées (Soit ceci, Soit cela) nous provient directement de la civilisation grecque (tout comme les Jeux Olympiques, ou la démocratie par exemple). Or, dans les cultures précédant l’époque hellénistique on privilégiait l’autre de ces schémas de pensées : celui où l’on pense en « ET ». J’aime les pizzas surgelées ET j’apprécie cuisiner un bon plat avec amour.

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Dans ce post, je vais te révéler 3 domaines de ma vie où j’ai découvert les plus grands paradoxes. Peut-être que tu te reconnaîtras dans l’un ou l’autre ?

 

1.     L’image de moi 

Quand j’ai pris mon premier appartement, à l’âge de 23 ans (presque Tanguy, je sais...), j’ai trouvé cette nouvelle solitude douce au possible. Je me rappelle de cette phrase délicieuse qui m’était venue alors : « J’aime être seule. Au moins, je suis en constante bonne compagnie. »

En même temps, j’éprouve la même sensation de vérité au fond de moi lorsque je lis la phrase de Christian Bobin : « Je ne sais pas si j’aimerais vivre avec quelqu’un comme moi. Dieu merci, je ne vis pas avec moi. »

(Peut-être que ces deux phrases me semblent simplement vraies parce que les deux me font sourire.)

 

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Toujours dans cette fenêtre sur l’image de moi, quelques mots sur mon apparence physique : je suis fière des 3 enfants que mon corps a portés, j’apprécie le fait d’être un peu enveloppée et d’être ainsi une maman douce et confortable. :-) Je voudrais surtout transmettre le même message de générosité à mes filles que celui que mes parents m’ont toujours transmis : les formes, c’est joli ! Mon père allait jusqu’à s’exclamer à la table familiale que c’était du « n’importe quoi, ces publicités qui voudraient nous faire croire qu’on aime faire l’amour avec un fil de fer ! ». (Ah, il me manque, mon Papa…)

ET, j’arrive au paradoxe, je n’aime pas spécialement les sourires attendris des gens dans la rue lorsqu’ils posent le regard sur mon bidon à la Winnie l’Ourson, l’air de dire : « Oh, je crois que j’ai deviné ton secret… » A ces personnes-là, j’ai envie de crier : « Eh bien non !!! Il n’y a PAS de secret ! Ok ? ». (Je ne peux pas leur en vouloir, je trouve moi-même que j’ai gardé la silhouette d’une femme enceinte…)

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Sûrement pour palier à ces sourires dans la rue, je me suis mise au sport.

 

2.     Le sport et moi

J’aime aller courir en forêt. Le bruit du vent dans les feuilles, le sol tendre et accueillant, le rythme de ma respiration, tout ça, je kiffe. Alors, quoi de plus naturel que de me remettre un peu au sport en faisant la piste finlandaise ? Seulement, j’avais un peu sous-estimé l’effet que les 3 grossesses ont eu sur moi. Je me retrouve à bout de souffle après 3 tours, le fameux point brûle déjà dans ma côte et quand je vais voir le tableau de courbes sur le panneau, je suis confrontée au résultat « insuffisant ». D’accord. Merci pour l’encouragement. J’aurais peut-être mieux fait de rester sur mon canapé, finalement. Le paradoxe, dans tout cela ? J’y arrive. Ce paradoxe est à la base du grand principe de la résilience. A une moins grande échelle, je le décrirais simplement comme ceci : les découragements peuvent servir à nous faire grandir ! (Je suis sûre que tu connais aussi des gens qui semblent avoir ce « don du découragement »… Ne nous laissons pas enfoncer par des remarques blessantes : au contraire, utilisons-les pour rebondir encore plus haut !)

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J’ai continué à m’entraîner (à chaque fois que je passe devant le panneau je lui fais un doigt d’honneur), et le jour où j’arriverai à monter d’un cran sur les courbes, que je passerai donc enfin de « insuffisant » à « mauvais », je déboucherai le champagne !

(Aucune psychologie, ces gourous du sport ! Pffff !)

 

3.     Ma plus grande faiblesse

Dans ce dernier point, je vais te confier une de mes plus grandes faiblesses. Ce n’est pas tout simple pour moi d’en parler, parce que j’aimerais mieux te partager des choses que je sais bien faire, où je suis à l’aise, sûre de moi, etc. Mais voilà : il se trouve que j’ai un côté un peu psycho-rigide en moi qui fait surtout surface dans le domaine de l’éducation. Pour devenir très concrète, je n’aime pas quand mes enfants ne m’obéissent pas. Je sais très bien qu'aucun parent ne saute de joie lorsque son bambin part en courant alors qu’on lui a demandé de venir. Seulement, dans mon cœur, il y a une crispation un peu démesurée qui se produit lorsqu’un enfant me désobéit. Cela vient me chercher profondément. Je peux devenir très dure en quelques secondes, et même si je n’en viens pas aux mains (sauf peut-être pour tirer un bras qui n’a pas voulu me suivre), mes regards et mes propos verbaux deviennent assassins.

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L’autre jour, nous avons eu des amis proches en visite, et la réaction de la maman m’a ouvert les yeux sur ma propre incapacité d’aimer. Sa fille de 4 ans lui désobéissait à plusieurs reprises (elle voulait toujours toucher les boules d’une guirlande lumineuses), et là, au lieu de se crisper et de s’énerver comme je l’aurais fait avec un de mes enfants, elle a réussi à l’éloigner de cet objet de tentation en la tirant avec elle sur le canapé. S’en est suivi une avalanche de rigolades et de chatouilles qui s’est terminée en une phrase chuchotée à son oreille (mais je l’ai quand-même entendue) : « Tu sais, Lucie, je t’aime ! Même quand tu fais la chipie ! »

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La même soirée, j’ai sorti la pire chose que je n’ai jamais prononcé de ma vie. Je l’ai dit devant ces invités, et pire, devant mes enfants. Je racontais à quel point la semaine avait été éprouvante pour moi et que ce matin-là, j’avais demandé à mon homme de prendre le relais dans la salle de bain où 3 enfants prenaient le bain en me rendant folle. J’ai dit que j’aurais pu les noyer.

Voilà, c’est dit. Ma dureté de cœur a prononcé une horreur pour laquelle j’allais me mordre les doigts par la suite. Il y a bien entendu la peur de « mais que vont-ils penser de moi ? », la peur des dégâts causés dans le cœur de mes petits trésors, mais aussi, et surtout, le deuil de la maman parfaite que je voudrais être pour mes enfants. Suite à cela, comme si cela ne suffisait pas, j’ai encore sorti 2-3 horreurs à mon homme, lorsque les invités étaient partis. Tu sais, du style « je déteste quand tu fais… » ou « vraiment, si tu pouvais changer patati et patata ». Marrant, non, comme on fait le plus de reproches à l’autre lorsqu’on ne se sent pas bien avec soi ?

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Le lendemain matin, j’ai réussi à m’échapper pendant une demi-heure de la vie familiale en me glissant dans mon lit. Là, cachée sous ma couette, j’ai pleuré à chaudes larmes tout ce qui devait sortir. Mon désillusionnement, ma honte et mon incapacité à me changer en profondeur. Et devine ce qui s’est passé ? J’ai senti une voix rassurante et douce me prononcer ce dont j’avais le plus besoin : « Je t’aime, Salomé, même quand tu fais la chipie. (Ou quand tu n’es pas à la hauteur de celle que tu voudrais être.) » Cet amour, bien plus grand que mon duvet, m’a enveloppée et a répondu à ce besoin que nous avons tous : « Aime-moi quand je le mérite le moins. C’est là que j’en ai le plus besoin. »

Traduction : "Tu es digne d'amour"

Traduction : "Tu es digne d'amour"

Le paradoxe, c’est qu’en touchant le fond, j’ai touché le Ciel.

 

Suite à ces quelques exemples personnels, je t'encourage à partir à la recherche des paradoxes qui enrichissent ta propre vie. Quel plaisir de réaliser qu'il n'y a pas qu'une sorte de logique, et que deux choses apparemment opposées peuvent très bien être embrassées ensemble !

Au final, je te souhaite de pouvoir accueillir ta plus grande faiblesse, en sachant que ce sera à cet endroit précis que tu pourras goûter à ce qui existe de meilleur : l’Amour !

 

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